CNCC 4-105

4-105 LETTRE DE CONFORT

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Introduction

.01- Cette norme définit les principes fondamentaux et les modalités particulières d’application de l’intervention du commissaire aux comptes sollicité pour émettre une lettre de confort sur des informations données par les dirigeants d’une entité à l’attention d’un tiers à l’occasion d’une opération financière.

.02- Une telle intervention du commissaire aux comptes nécessite la prise en compte du caractère légal de sa mission, et notamment du fait qu’une lettre de confort peut lui être demandée alors que la réglementation française et les normes de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes prévoient l’émission de son avis sur certaines informations contenues dans un prospectus préparé par la société émettrice.

Elle nécessite également de prendre en considération les obligations qui gouvernent son comportement professionnel, en terme de secret professionnel notamment.

.03- Une lettre de confort, au sens de la présente norme, est une attestation du commissaire aux comptes dans laquelle il exprime une assurance de nature ou de niveau approprié sur des informations préparées par les dirigeants de l’entité, portant sur la situation financière ou les comptes, et destinée, dans le cadre d’une opération financière, à un tiers désigné, généralement le banquier finançant ou garantissant la bonne fin de l’opération.

Champ d’application

.04- La présente norme s’applique à la vérification, par le commissaire aux comptes d’une entité, d’informations portant sur la situation financière ou les comptes de cette entité, contenues dans des documents préparés par ses dirigeants à l’occasion de la réalisation d’une opération financière, en France ou à l’étranger, et dont le commissaire aux comptes rend compte dans une lettre n’ayant pas vocation à être rendue publique.

La présente norme est ainsi applicable aux placements effectués à l’étranger, sauf si le commissaire aux comptes accepte d’émettre sa lettre de confort en faisant référence aux normes professionnelles d’audit généralement admises dans le pays concerné.

.05- La présente norme ne s’applique pas à la vérification des informations contenues dans un prospectus soumis au contrôle de la Commission des opérations de bourse et faisant l’objet d’un avis du commissaire aux comptes conformément aux dispositions de la norme CNCC 6-801.

En effet, le commissaire aux comptes ne saurait exprimer dans une lettre de confort, sur les informations présentées dans ce prospectus, une assurance :

– de nature ou d’un niveau différent de celle exprimée dans son avis,

– ou portant sur des informations qui, eu égard à leur nature, ne conduisent pas à la formulation d’une assurance explicite dans son avis.

.06- Elle ne s’applique pas davantage au contrôle, par le commissaire aux comptes, de comptes intermédiaires, prévisionnels ou pro-forma qui pourraient être établis pour préparer ou concrétiser une opération financière, qui fait l’objet de normes professionnelles ad hoc.

Nature et objectifs de l’intervention

.07- L’intervention du commissaire aux comptes relève des « autres interventions définies… » prévues par le cadre conceptuel de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes, ayant pour objet, dans le cadre d’objectifs définis conventionnellement, de vérifier la « concordance d’un chiffre, d’une information avec le chiffre ou l’information figurant dans un autre document… » ou d’apprécier « la sincérité et un degré de fiabilité de l’information… » ou encore d’analyser « des faits ou des situations dans le cadre des diligences définies ».

Le commissaire aux comptes communique les conclusions de ses travaux dans une lettre transmise aux dirigeants de l’entité.

.08- Lorsque les informations concernées n’ont pas fait l’objet de diligences de la part du commissaire aux comptes dans le cadre de sa mission légale, il détermine la nature et l’étendue des travaux à mettre en Å“uvre en fonction de la nature ou du niveau de l’assurance à obtenir sur ces informations.

Acceptation de l’intervention

.09- Le commissaire aux comptes n’est pas un dispensateur direct d’informations ; mais il peut, après avoir pris en considération le facteur d’utilité ou de service pour l’entité, se prononcer sur des informations figurant dans un document établi par celle-ci, dès lors qu’elles entrent dans le champ de ses investigations et après avoir procédé aux contrôles appropriés.

.10- La conduite du commissaire aux comptes se réfère aux principes de base qui gouvernent son comportement professionnel, notamment en matière d’indépendance, de compétence, de qualité du travail et de secret professionnel.

.11- Préalablement à son acceptation d’émettre la lettre de confort demandée, le commissaire aux comptes considère la nature des informations concernées, la période sur laquelle elles portent, ainsi que les critères auxquels il sera conduit à se référer pour se prononcer, afin de déterminer s’il lui est possible, dans le cadre de travaux appropriés, d’accepter l’intervention demandée.

Dès ce stade, le commissaire aux comptes apprécie les limites de son intervention et la façon de les exprimer dans la lettre de confort sollicitée.

.12- Le commissaire aux comptes sera conduit à ne pas répondre favorablement à la demande qui lui est faite lorsqu’elle concerne :

– des informations qui ne portent pas sur la situation financière ou les comptes de l’entité, telles que, par exemple, des analyses économiques, des données de nature commerciale, des renseignements concernant l’activité de l’entité (historique, investissements, volumes vendus, … ), les résultats de scénarii, ou encore les conséquences des intentions ou des objectifs de la direction de l’entité ;

– des déclarations comportant une appréciation de nature qualitative et pour lesquelles le commissaire aux comptes ne dispose pas de critères appropriés auxquels se référer pour exprimer sa conclusion (par exemple, absence de difficulté financière, « material adverse change », capacité de remboursement de l’émetteur, …) ;

– la qualité du contrôle interne dont la vérification s’inscrit dans le cadre d’une intervention et d’une démarche différentes de celles prévues pour la délivrance d’une lettre de confort.

Enfin, le commissaire aux comptes n’acceptera pas d’émettre une lettre de confort s’il considère ne pas pouvoir mettre en Å“uvre les diligences estimées nécessaires dans les délais impartis.

Formalisation du cadre d’intervention

.13- Lorsque le commissaire aux comptes décide de répondre favorablement à la demande qui lui est faite, il confirme aux dirigeants de l’entité la nature et les conditions de son intervention, y compris les modalités de communication avec le banquier.

L’établissement d’une lettre d’intervention permet notamment de confirmer les objectifs des travaux et de délimiter la responsabilité du commissaire aux comptes dans cette extension conventionnelle de sa mission légale.

.14- Afin d’éviter tout malentendu sur la nature et les conditions de l’intervention du commissaire aux comptes, et donc sur le contenu de la lettre de confort, celui-ci joint à sa lettre d’intervention :

– un exemple de la lettre de confort qui pourrait être émise, comportant un avertissement sur le fait qu’il ne s’agit que d’un projet – en l’état de la demande exprimée – dont la formulation dépendra du résultat des travaux effectués ;

– le contenu de la lettre qu’il demandera aux dirigeants de l’entité de lui adresser, mettant à jour les déclarations précédemment obtenues (cf. paragraphe .23- ci-après).

.15- En outre, dans sa lettre d’intervention, le commissaire aux comptes :

– identifie les documents dans lesquels figurent les informations préparées par les dirigeants et faisant l’objet de son intervention (cf. § .18- ci-après) ;

– précise que ses diligences, en vue de l’émission d’une lettre de confort, ne sont pas destinées à remplacer les investigations qu’il appartient au banquier de mettre en Å“uvre sur l’opportunité et les conditions de l’opération projetée.

.16- Compte tenu du caractère fréquemment international des opérations financières concernées, le commissaire aux comptes précise, dans sa lettre d’intervention, l’application de la loi française et la compétence exclusive des juridictions françaises pour tout litige pouvant trouver son origine dans cette extension de sa mission légale.

.17- Le commissaire aux comptes adresse sa lettre d’intervention aux dirigeants de l’entité, auxquels il revient de la communiquer au banquier.

Il demande aux dirigeants de formaliser par écrit leur acceptation des termes de sa lettre d’intervention et de lui confirmer que celle-ci correspond bien aux attentes du banquier.

Diligences du commissaire aux comptes

.18- Le commissaire aux comptes obtient suffisamment tôt le projet de contrat (d’émission, de placement, d’emprunt, …) établi entre l’entité et la banque.

Il prend connaissance de ce projet afin :

– d’identifier les documents comportant les informations faisant l’objet de son intervention et de comprendre les points sur lesquels il est attendu de sa part la formulation de conclusions,

– de réfléchir sur les formulations les plus appropriées pour ses conclusions et préparer le projet de lettre de confort à joindre à sa lettre d’intervention.

.19- Pour les informations qui n’ont pas été couvertes par un audit ou par un examen limité, le commissaire aux comptes met en Å“uvre des diligences répondant aux objectifs conventionnellement définis.

Il en est notamment ainsi :

– des informations – portant sur la situation financière ou les comptes – faisant l’objet d’une vérification de sincérité, qui s’apprécie au regard de leur cohérence d’ensemble, de leur pertinence et de leur vraisemblance,

– du suivi des conséquences d’événements intervenus après l’émission du rapport du commissaire aux comptes sur les derniers comptes soumis à un audit ou un examen limité,

– de l’évolution de composantes des comptes, postérieurement aux derniers comptes soumis à un audit ou un examen limité (par exemple, l’évolution du chiffre d’affaires, des capitaux propres, de l’endettement, …).

Planification des travaux

.20- Le commissaire aux comptes planifie ses travaux en prenant en considération sa connaissance générale de l’entité et de ses activités, acquise dans le cadre de sa mission générale, et en tenant compte du calendrier de réalisation de l’opération financière envisagée.

Il formalise cette planification dans un programme de travail.

Règles particulières de comportement

.21- Les réunions de travail éventuelles avec le banquier se font en présence de la direction de l’entité. Au cours de ces réunions, le commissaire aux comptes veille à ne pas formuler un quelconque confort ou assurance verbale avant d’avoir finalisé ses travaux.

Cas particulier de la première année de mandat du commissaire aux comptes

.22- Lorsque le commissaire aux comptes intervient dans le courant de sa première année de mandat et que les comptes de l’exercice en cours n’ont pas encore été audités, il s’interroge sur la possibilité réelle de mettre en Å“uvre des diligences suffisantes dans les délais impartis pour pouvoir formuler l’assurance attendue. Ses diligences seront plus ou moins étendues selon que les comptes des exercices précédents auront été audités ou pas.

– S’agissant des comptes des exercices antérieurs, les travaux du commissaire aux comptes portent sur la correcte retranscription des données extraites des comptes annuels ou consolidés. Il indique en conséquence dans sa lettre de confort les diligences effectuées et précise qu’un autre professionnel est intervenu et a émis une opinion sur les comptes des exercices concernés.

– Outre les diligences prévues par la norme CNCC 2-405, destinées notamment à vérifier que le compte de résultat de l’exercice de son entrée en fonction n’est pas affecté par des erreurs sur le bilan d’ouverture ou par des changements comptables non justifiés, le commissaire aux comptes est généralement conduit à examiner les travaux et les dossiers de son prédécesseur, afin d’acquérir une compréhension suffisante des comptes de l’entité, d’apprécier l’étendue des travaux de son confrère au regard de ses propres objectifs, et de déterminer, le cas échéant, les diligences complémentaires à mettre en Å“uvre dans le cadre de l’émission de sa lettre de confort.

Déclarations de la direction

.23- Afin de confirmer diverses déclarations recueillies au cours de son intervention, tout en évitant les erreurs d’interprétation, le commissaire aux comptes obtient des dirigeants de l’entité, avant l’émission de sa lettre de confort, une lettre d’affirmation datée du même jour que sa lettre de confort (ou de chaque lettre en cas de lettres de confort successives), actualisant les déclarations précédemment obtenues pour les besoins de ses derniers rapports d’audit ou d’examen limité, et confirmant notamment :

– l’absence d’événements postérieurs ou de faits susceptibles d’influencer le jugement des investisseurs et qui ne seraient pas traduits dans les documents ou informations préparés par les dirigeants,

Рle cas ̩ch̩ant, toute autre d̩claration n̩cessaire en fonction des caract̩ristiques des informations v̩rifi̩es et de la formulation attendue dans sa lettre de confort.

Documentation

.24- Le commissaire aux comptes consigne dans son dossier les documents reçus, les travaux exécutés et ses constatations. En particulier, et s’il y a lieu, il établit des compterendus des réunions tenues avec les représentants de l’entité en la présence du banquier. Il décrit précisément les diligences effectuées sur chacun des points sur lesquels porte sa lettre de confort.

Préparation et transmission de la lettre de confort

Préparation de la lettre de confort

.25- La lettre de confort décrit les diligences mises en œuvre par le commissaire aux comptes pour répondre à la demande qui lui a été faite ainsi que la période couverte par ses contrôles, pour en faire ressortir clairement les objectifs et les limites.

Le commissaire aux comptes précise ainsi, le cas échéant, qu’il n’a pas effectué d’audit sur les comptes intermédiaires établis postérieurement aux derniers comptes (annuels ou consolidés) audités ou sur les informations issues de ces derniers comptes.

Dans la description des diligences mises en Å“uvre, le commissaire aux comptes souligne leurs limites, en particulier lorsqu’elles ont été définies conventionnellement avec les dirigeants de l’entité.

.26- La lettre de confort est datée.

Cette date correspond généralement à la date à laquelle est établi le contrat entre la société émettrice et la banque, concrétisant l’opération financière. Lorsque cette date est postérieure à la fin des travaux du commissaire aux comptes, celui-ci précise qu’aucune vérification n’a été conduite entre la fin de la période couverte par ses travaux et la date d’émission de la lettre de confort (ou de la dernière lettre de confort en cas de lettres successives).

.27- Les informations sur lesquelles ont porté les travaux du commissaire aux comptes sont jointes à la lettre de confort.

.28- Le commissaire aux comptes précise dans sa lettre (ou la dernière, en cas de lettres successives) qu’il ne lui appartient pas de la mettre à jour pour tenir compte des faits et circonstances postérieurs à sa date de signature.

.29- Le commissaire aux comptes reprend dans sa lettre de confort la clause de compétence légale et de juridiction contenue dans sa lettre d’intervention et rappelle le contexte dans lequel sa lettre de confort a été établie ainsi que les limites qui en découlent en matière d’utilisation et de diffusion, selon une formulation à adapter à chaque cas d’espèce.

.30- Afin d’éviter toute assimilation inappropriée avec des pratiques en vigueur dans d’autres pays, le commissaire aux comptes précise dans sa lettre de confort que :

– les comptes annuels, consolidés, et/ou intermédiaires préparés par l’organe compétent de l’entité, s’ils sont présentés dans un document d’information (Offering Circular, …) ont été établis selon les principes comptables généralement admis en France,

– l’audit, l’examen limité et/ou l’examen effectués l’ont été conformément aux normes professionnelles applicables en France,

– le cas échéant, les rapports émis dans le cadre de ces interventions et figurant (éventuellement par référence) dans un document d’information sur lequel porte la lettre de confort n’ont pas été mis à jour pour tenir compte des événements qui seraient survenus postérieurement à leur émission ,

– il ne saurait être tenu responsable des conséquences dommageables résultant d’un comportement dolosif ou d’une fraude de la part d’un dirigeant, d’un salarié de l’entité, ou encore du banquier.

La formulation rappelle également que les vérifications précitées ont été conduites dans le but de formuler une conclusion sur les informations considérées dans leur ensemble et non individuellement.

.31- Dans la lettre de confort qu’il émet, le commissaire aux comptes exprime la conclusion de ses travaux sous une forme adaptée aux objectifs de son intervention.

.32- Le commissaire aux comptes est attentif à la formulation de sa lettre de confort sur les points suivants :

-continuité d’exploitation : a titre d’exemple, s’il lui est demandé de confirmer que l’entité n’a pas de difficulté financière, le commissaire aux comptes ne peut répondre directement, mais :

-indique que, dans le cadre de sa mission générale, il a eu à apprécier l’application de la convention de continuité de l’exploitation conformément à la norme 2-435 de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes ;

– décrit, le cas échéant, les diligences mises en Å“uvre (entretiens avec les dirigeants, lecture des procès-verbaux, lecture des derniers comptes de gestion, …) sur la période postérieure pour laquelle aucun comptes intermédiaires susceptibles de faire l’objet d’un audit ou d’un examen limité ne sont disponibles ;

– conclut que, sur la base de ces seules diligences, il n’a pas relevé d’élément qui pourrait le conduire à déclencher la procédure d’alerte prévue par la loi conformément à la norme 6-702 de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes.

– indépendance : lorsqu’une affirmation spécifique sur son indépendance est demandée au commissaire aux comptes, celui-ci retient une formulation adaptée au cadre légal français.

Transmission de la lettre de confort

.33- S’il en a été convenu ainsi, le commissaire aux compte indique dans l’en-tête de sa lettre de confort qu’elle est destinée au banquier. Dans tous les cas, compte tenu des règles en matière de secret professionnel, le commissaire aux comptes transmet sa lettre de confort aux dirigeants de l’entité, auxquels il revient de la communiquer au banquier destinataire.

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