CNCC 6-807

6-807.    INFORMATION DES AUTORITÉS DE CONTRÔLE DE CERTAINES ENTITES

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Introduction

.01- La présente norme a pour objet de définir des principes fondamentaux et de préciser leurs modalités d’application concernant le devoir d’information des autorités de contrôle de certaines entités par leurs commissaires aux comptes, selon les dispositions instaurées par les articles 50, 51, 55 et 58 de la loi n° 99-532 du 25 juin 1999 relative à l’épargne et à la sécurité financière et par l’article L.510-5 du Code de la mutualité.

.02- En application de ces dispositions, le commissaire aux comptes signale, dans les meilleurs délais, aux autorités respectivement visées par les articles sus-visés, tout fait ou décision dont il a eu connaissance dans l’exercice de sa mission, de nature :

-ou constituer une violation des dispositions législatives ou réglementaires visées par la loi précitée et susceptible d’avoir des effets significatifs sur la situation financière, le résultat ou le patrimoine de l’entité concernée, ou

– à porter atteinte à la continuité d’exploitation de cette entité, ou

– à entraîner l’émission de réserves ou d’un refus de certifier de ses comptes.

Lorsque l’entité a la qualité  de prestataire de services d’investissement ou d’intermédiaire habilité en vue de la conservation et de l’administration d’instruments financiers, le commissaire aux comptes signale au Conseil des marchés financiers  tout fait ou décision dont il a eu connaissance dans l’exercice de sa mission et de nature à constituer une violation des dispositions du règlement général du Conseil des marchés financiers relatives aux règles de bonne conduite ou aux conditions d’exercice des activités de conservation ou d’administration d’instruments financiers.

Champ d’application

.03- L’obligation de signaler prévue par ces dispositions législatives et figurant dans les différents codes concernés, s’impose aux commissaires aux comptes qui interviennent dans les entités suivantes (les articles visés par les différents codes et les autorités et organismes destinataires des informations  sont précisées entre parenthèses) :

-Les établissements de crédit (article. L.613-9 du code monétaire et financier / auprès de la Commission bancaire) ;

-Les établissements de crédit affiliés à un organe central (art. L.613-9 du code monétaire et financier  / transmis simultanément à l’organe central et à la Commission bancaire).

-Les  prestataires de services d’investissement autres que les sociétés de gestion de portefeuille (article L.613-9 et L.622-11 du code monétaire et financier / auprès de la Commission bancaire et du conseil des marchés financiers) ;

-Les compagnies financières (article L.517-1 du code monétaire et financier / auprès de la Commission bancaire) ;

-Les sociétés de gestion de portefeuille (article L.621-23 du Code monétaire et financier / auprès de la Commission des opérations de bourse ) ;

-Les SICAV (article L.214-17 du Code  monétaire et financier / auprès de la Commission des opérations de bourse) ;

-Les fonds communs de placement, y compris les fonds communs de placement spécialisés (article L.214-29 du Code monétaire et financier / auprès de la Commission des opérations de bourse) ;

-Les entreprises d’assurance définies dans le code des assurances aux articles L. 310-1 (entreprises d’assurance), L. 310-1-1 (entreprises de réassurance) et L. 345-1 (sociétés de  participation d’assurance) (article L.310-19 du Code des assurances / auprès de la Commission de contrôle des assurances) ;

-Les institutions de prévoyance (article L.951-6 du Code de la sécurité sociale / auprès de la Commission de contrôle instituée par l’article L.951-1 du Code de la sécurité sociale) ;

-Les mutuelles, unions et fédérations (article L.510-6 du Code de la mutualité / auprès de la Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance instituée par l’article L.951-1 du Code de la sécurité sociale) ;

-Les membres des marchés  réglementés(article L.613-9 du code monétaire et financier / auprès de la Commission bancaire) ;

-Les adhérents aux chambres de compensation(article L.613-9 du code monétaire et financier / auprès de la Commission bancaire) ;

-Les personnes morales visées au 4 de l’article L.511-21 du Code monétaire et financier (article L.613-9 du code monétaire et financier / auprès de la Commission bancaire) ;

-Les intermédiaires habilités en vue de la conservation et de l’administration d’instruments financiers (article L.622-11 du code monétaire et financier / auprès du Conseil des marchés financiers).

Nature et objectifs de l’intervention du commissaire aux comptes

.04- L’obligation pour le commissaire aux comptes de signaler certains faits ou décisions aux autorités visées par les textes s’inscrit parmi les «autres interventions définies» prévues par le cadre conceptuel, ayant pour objet de «porter à la connaissance, signaler des faits, des situations, des informations … ».

.05- La réalisation de la mission du commissaire aux comptes, telle qu’elle est définie par le Code de commerce, exige, conformément aux normes professionnelles applicables en France, une prise de connaissance de l’entité, et notamment de la réglementation particulière applicable à son secteur d’activité, lui permettant d’appréhender les domaines et systèmes significatifs et d’orienter sa mission. Cette approche a pour objectif d’identifier les risques pouvant avoir une incidence significative sur les comptes.

Le commissaire aux comptes détermine et organise ainsi ses travaux d’audit de manière à obtenir l’assurance raisonnable que les comptes ne contiennent pas d’anomalies significatives, c’est-à-dire d’anomalies susceptibles de modifier sensiblement la situation financière, le résultat ou le patrimoine de l’entité, ou l’interprétation qui peut en être faite.

.06- Les dispositions législatives précitées retiennent, pour circonscrire le champ des obligations qu’elles confèrent au commissaire aux comptes, les notions :

-d’effets significatifs sur la situation financière, le résultat ou le patrimoine ;

-de continuité d’exploitation ;

-de réserves et de refus de certifier.

Ce faisant, elles s’inscrivent pleinement dans le cadre de la mission générale du commissaire aux comptes sans en modifier les objectifs essentiels. Elles ne sauraient donc transformer celui-ci en garant du respect de l’ensemble de la réglementation applicable à l’entité ou le conduire à rechercher des irrégularités qui ne seraient pas liées aux objectifs directs de sa mission ou qui ne seraient pas susceptibles d’avoir des effets significatifs.

Ces dispositions législatives créent cependant pour le commissaire aux comptes une obligation de signaler certains faits ou décisions dont la réalisation de sa mission l’a conduit à avoir connaissance.

Une telle obligation de signaler renforce la nécessité, pour le commissaire aux comptes, d’avoir une connaissance appropriée des dispositions législatives ou réglementaires applicables à l’entité, de manière à être à même de pouvoir identifier, parmi les éventuelles anomalies relevées au cours de sa mission, celles qui constituent une violation des textes visés par chacun des articles cités au paragraphe .03-, plus généralement, qui doivent être signalées aux autorités compétentes.

Faits ou décisions concernés

.07- Les faits ou décisions qui doivent être signalés aux autorités visées par les textes sont de nature à :

-s’agissant des établissements de crédit, des prestataires de services d’investissement, des compagnies financières, des sociétés de gestion de portefeuille, des sociétés d’investissement à capital variable, des membres des marchés réglementés, des adhérents aux chambres de compensation et des personnes morales visées au 4 de l’article L.511-21 du Code monétaire et financier, constituer des « violations des dispositions législatives ou réglementaires applicables à ces entités et susceptibles d’avoir des effets significatifs sur la situation financière, le résultat ou le patrimoine » ;

-s’agissant des fonds communs de placement, constituer « un manquement au fonds et susceptible d’avoir des effets significatifs sur la situation financière, le résultat ou le patrimoine » ;

-s’agissant des entreprises d’assurance, constituer « une violation aux dispositions des titres II à IV du livre III et du chapitre 1er du titre IV du livre IV du Code des assurances, susceptible d’avoir des effets significatifs sur la situation financière, le résultat ou le patrimoine » ;

-s’agissant des institutions de prévoyance, constituer « une violation des dispositions du chapitre 1er du titre III du livre IX ou du titre V et susceptible d’avoir des effets significatifs sur la situation financière, le résultat ou le patrimoine ».

-s’agissant des mutuelles, unions ou fédérations, constituer « une violation des dispositions du Code de la mutualité et susceptible d’avoir des effets significatifs sur la situation financière, le résultat ou le patrimoine » ;

Le caractère significatif des effets possibles de la violation de ces textes sur la situation financière, le résultat ou le patrimoine de chaque entité concernée est apprécié par le commissaire aux comptes au regard des éléments quantitatifs et qualitatifs utilisés dans le cadre de sa mission générale, en particulier lors de la fixation du seuil de signification.

.08- En outre, en ce qui concerne les prestataires de services d’investissement et les intermédiaires habilités en vue de la conservation et de l’administration d’instruments financiers, font partie des faits ou décisions à signaler ceux qui sont de nature à constituer une violation des dispositions du règlement général du Conseil des marchés financiers relatives aux règles de bonne conduite ou aux conditions d’exercice des activités de conservation ou d’administration d’instruments financiers.

Il convient de souligner que le commissaire aux comptes ne pourra avoir connaissance de tels faits ou décisions, dans le cadre de sa mission, que pour autant que ceux-ci sont relatifs à l’objet direct de celle-ci ou présentent un caractère significatif.

.09- Sont également concernés les faits ou décisions de nature à porter atteinte à la continuité de l’exploitation des entités mentionnées au paragraphe .07- ci-dessus.

La notion de continuité de l’exploitation visée par ces dispositions légales est celle déjà définie en matière comptable pour l’établissement des comptes et en matière de prévention des difficultés des entreprises.

Les faits ou décisions concernés sont donc les mêmes que ceux que le commissaire aux comptes considère dans le cadre de la certification des comptes ou dans celui de la mise en Å“uvre de la procédure d’alerte.

.10- Sont enfin concernés les faits ou décisions de nature à entraîner l’émission de réserve(s) ou d’un refus de certifier des comptes des entités mentionnées au paragraphe 07- ci-dessus.

Il s’agit donc de faits ou décisions créant des situations de désaccord sur le choix ou l’application des règles et méthodes comptables, de limitation dans la mise en Å“uvre des diligences estimées nécessaires ou d’incertitudes graves et multiples.

Diligences du commissaire aux comptes

Connaissance des faits ou décisions dans l’exercice de la mission

.11- Étant donné la nature des faits ou décisions que ces dispositions légales font obligation au commissaire aux comptes de signaler, celles-ci ne modifient pas les objectifs essentiels de la mission du commissaire aux comptes.

.12- La mission du commissaire aux comptes doit être entendue comme celle prévue par le Code de commerce et se définit ainsi comme un ensemble complexe de missions.

Elle comprend par conséquent non seulement la mission d’audit et les missions spécifiques, mais aussi l’ensemble des interventions du commissaire aux comptes que la loi prévoit en cas d’opérations particulières décidées par l’entité ou d’événements survenant dans celle-ci.

De même, elle comprend les interventions dites conventionnelles du commissaire aux comptes, effectuées à la demande de l’entité et dans le respect des principes fondamentaux de comportement et des règles générales fixées par le Code de déontologie.

.13- Il appartient ainsi au commissaire aux comptes d’être à même de pouvoir identifier, parmi les constatations faites lors de la réalisation de sa mission telle que définie ci-dessus, celles qui proviennent ou révèlent des faits ou décisions devant être signalés en vertu des dispositions légales précitées.

.14- Le commissaire aux comptes d’une entité mentionnée au paragraphe .03-  peut également avoir connaissance de faits ou décisions concernant ladite entité et devant être signalés, dans le cadre de l’exercice de sa mission auprès d’une entité « liée ».

Constituent des entités «liées» au sens des dispositions légales précitées :

-les sociétés mères ou filiales des établissements de crédit, des entreprises d’investissement, des compagnies financières, des entreprises d’assurance définies dans le Code des assurances aux articles L. 310-1, L. 310-1-1- et L. 345-1 ;

-les entreprises filiales des institutions de prévoyance, les institutions ou entreprises relevant du second alinéa de l’article L. 931-34 du Code de la sécurité sociale.

– les entreprises filiales de la mutuelle, de l’union ou de la fédération ou les organismes relevant de l’article L.212-7 du Code de la mutualité.

Sont concernés par cette disposition :

-le commissaire aux comptes désigné à la fois dans une entité mentionnée au paragraphe .03- et dans une entité liée telle que définie ci-dessus;

-le commissaire aux comptes d’une entité consolidante mentionnée au paragraphe .03- dans le cadre de l’examen des dossiers de travail du commissaire aux comptes d’une entité liée, telle que définie ci-dessus, entrant dans la consolidation, et des investigations qu’il peut être conduit à effectuer sur les comptes de ladite entité.

Comportement du commissaire aux comptes

.15- Si, dans l’exercice de sa mission, le commissaire aux comptes a connaissance de faits ou décisions susceptibles de devoir être signalés aux autorités visées par les textes, il met en Å“uvre les procédures nécessaires lui permettant de fonder sa décision.

Dans cet objectif, le commissaire aux comptes est conduit à :

-compléter ses informations sur la nature des faits ou décisions relevés ;

-apprécier les effets possibles, et l’ importance, de ces faits ou décisions ;

-s’enquérir des circonstances en raison desquelles une violation des textes visés par la loi a pu se produire.

Pour ce faire, il apparaît utile que le commissaire aux comptes ait des entretiens avec les responsables appropriés, éventuellement les dirigeants sociaux.

.16- Par ailleurs, le commissaire aux comptes détermine si ces faits ou décisions sont de nature à avoir une incidence sur sa démarche d’audit (par exemple, remise en cause de son évaluation des risques, et notamment du risque lié au contrôle interne) ou sur d’autres aspects de sa mission (cf. paragraphe .21-et .22- ci-après).

.17- Dès lors que le commissaire aux comptes a relevé des faits ou décisions susceptibles de devoir être signalés, il établit et conserve dans son dossier une feuille de travail documentant les investigations complémentaires qu’il a été conduit à mettre en Å“uvre et faisant état de sa décision de signaler, ou, à l’inverse, justifiant les raisons pour lesquelles il a décidé de ne pas signaler lesdits faits ou décisions.

.18- La régularisation d’une situation, effectuée à la demande du commissaire aux comptes ou spontanément par l’entité, ne saurait fonder, à elle seule et de manière systématique, la décision du commissaire aux comptes de ne pas signaler les faits ou décisions à l’origine de cette situation. Nonobstant toute régularisation, le commissaire aux comptes sera ainsi conduit à signaler les faits ou décisions relevés lorsqu’il constatera qu’il demeure des effets ou des risques significatifs possibles ou que le fonctionnement normal des contrôles mis en place par l’entité ne permet pas d’éviter ou de détecter et corriger  les faits ou décisions concernés.

Procédure

.19- Le commissaire aux comptes signale les faits ou décisions relevés dans les meilleurs délais :

-s’agissant de faits ou de décisions de nature à constituer une violation de dispositions législatives ou réglementaires et susceptibles d’avoir des effets significatifs sur la situation financière, le résultat ou le patrimoine (cf. paragraphe .07-), le commissaire aux comptes les signale le plus rapidement possible après qu’il en a eu connaissance ; il en est de même des faits ou décisions de nature à constituer une violation des dispositions du règlement général du Conseil des marchés financiers (telles que visées paragraphe .08-) ;

-s’agissant de faits ou décisions de nature à porter atteinte à la continuité de l’exploitation (cf. paragraphe .09-), le commissaire aux comptes les signale de manière concomitante à la mise en Å“uvre de sa procédure d’alerte ;

-s’agissant de faits ou décisions de nature à entraîner l’émission de réserve(s) ou d’un refus de certifier des comptes (cf. paragraphe .10-), le commissaire aux comptes les signale dès qu’il a acquis la conviction qu’aucun fait ou élément nouveau ne pourra modifier la nature de son opinion.

En général, cette démarche est ainsi effectuée dès que possible après la réunion de l’organe d’administration qui a la responsabilité d’arrêter les comptes.

.20- Indépendamment de tout entretien oral que le commissaire aux comptes a pu avoir avec les représentants
des autorités visées par les textes, il procède de manière formelle à l’obligation de signaler qui lui incombe.

Le commissaire aux comptes décrit, de manière factuelle, les faits ou décisions relevés et précise, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles une régularisation a pu intervenir.

Liens avec les autres composantes de la mission du commissaire aux comptes

.21- L’obligation faite au commissaire aux comptes de signaler aux autorités compétentes les faits ou décisions définis aux paragraphes .07- à .10- ci-dessus ne se substitue pas aux autres obligations que peut avoir le commissaire aux comptes, pour les mêmes faits, en termes, par exemple, d’information du conseil d’administration (article L. 823-16 du Code de commerce), d’information des actionnaires (article L. 225-240 du Code de commerce), de révélation au procureur de la République (article L. 225-240 du Code de commerce), ou encore de procédure d’alerte (article L. 234-1 du Code de commerce).

.22- Cependant, les faits ou décisions signalés aux autorités visées par les dispositions légales n’entraînent pas, de manière systématique, une démarche du commissaire aux comptes dans le cadre de ses obligations d’information ou de révélation rappelées ci-dessus. Il appartient au commissaire aux comptes d’analyser les faits ou décisions concernés au regard de chacune de ses obligations, en prenant en considération les suites éventuelles données par les autorités auxquelles il a signalé lesdits faits ou décisions.

De même, une telle information ou révélation n’entraîne pas, de manière systématique, une obligation de signaler les faits ou décisions concernés aux autorités visées par les dispositions légales précitées.

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