NEP-9605. Norme d’exercice professionnel relative aux obligations du commissaire aux comptes relatives à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme
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Mots clés
NEP 9605, blanchiment, mission du commissaire aux comptes, financement, terrorisme, Tracfin, révélation des faits délictueux, contrôle interne, décision, H3C, Haut conseil du commissariat aux comptesS
Résumé
Cette norme d’exercice professionnel a été homologuée par arrêté du 20 avril 2010 publié au J.O. n° 0101 du 30 avril 2010.
Table des matières
- 1. Introduction
- 2. Obligations de vigilance à l’égard de l’entité et du bénéficiaire effectif
- 3. Obligations de vigilance à l’égard des opérations réalisées par l’entité
- 4. Obligations de déclaration à TRACFIN
- 5. Liens éventuels entre la déclaration à TRACFIN et la révélation des faits délictueux au procureur de la République
- 6. ANNEXE 8-9 citée au paragraphe 04 de la NEP 9605
Norme d’exercice professionnel
Cette norme d’exercice professionnel a été homologuée par arrêté du 20 avril 2010 publié au J.O. n° 0101 du 30 avril 2010. Elle est accompagnée de la décision du H3C du 14 janvier 2010 relative aux procédures et mesures de contrôle interne en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme.
1. Introduction
01. En application de l’article L. 823-12 du code de commerce, les commissaires aux comptes mettent en oeuvre les obligations relatives à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme définies aux sections 2 à 7 du chapitre Ier du titre VI du livre V du code monétaire et financier.
02. La présente norme s’applique au commissaire aux comptes avant l’acceptation d’un mandat de commissaire aux comptes et au cours de l’exercice de ce mandat, lorsqu’il intervient au titre de missions définies par la loi et de prestations entrant dans les diligences directement liées à la mission.
03. La présente norme a pour objet de définir les principes relatifs à la mise en oeuvre des dispositions des sections précitées qui concernent :
- la vigilance à l’égard de l’identification de l’entité et du bénéficiaire effectif ;
- la vigilance à l’égard des opérations réalisées par l’entité ;
- la déclaration à TRACFIN.
Elle définit, en outre, les liens éventuels entre la déclaration à TRACFIN et la révélation des faits délictueux au procureur de la République.
04. En application de l’article R. 561-38 III du code monétaire et financier, le commissaire aux comptes met par ailleurs en oeuvre les procédures et les mesures de contrôle interne en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme définies par l’autorité de contrôle qui figurent à l’annexe 8-9[1] du présent livre[2].
2. Obligations de vigilance à l’égard de l’entité et du bénéficiaire effectif
05- Avant d’accepter le mandat, le commissaire aux comptes :
- identifie l’entité et, le cas échéant, le bénéficiaire effectif de la mission par des moyens adaptés et vérifie ces éléments d’identification sur présentation de tout document écrit probant, en application de l’article L. 561-5 I du code monétaire et financier ;
- recueille par ailleurs tout élément d’information pertinent sur l’entité en application de l’article L. 561-6 du même code.
06. – Le commissaire aux comptes n’est pas soumis aux obligations de vigilance mentionnées au paragraphe 5 lorsqu’il n’existe pas de soupçon de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme et que l’entité, ou, le cas échéant, le bénéficiaire effectif, est :
- une personne mentionnée aux 1 à 6 de l’article L. 561-2 du code précité, notamment une banque, une entreprise d’assurance, une institution de retraite ou une mutuelle régie par le livre II du code de la mutualité, ou
- une société cotée dont les titres sont admis à la négociation sur au moins un marché réglementé en France ou dans un Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou dans un pays tiers imposant des exigences de publicité compatibles avec la législation communautaire, figurant sur une liste arrêtée par le ministre chargé de l’économie ;
- une autorité publique ou un organisme public tel que défini à l’article R. 561-15 du code précité.
2.1. Identification de l’entité
07. – Afin d’identifier l’entité, en application de l’article R. 561-5 du code précité, le commissaire aux comptes demande la communication de tout acte ou extrait de registre officiel datant de moins de trois mois constatant la dénomination, la forme juridique, l’adresse du siège social et l’identité des associés et dirigeants sociaux mentionnés aux 1 et 2 de l’article R. 123-54 du code de commerce. Dans les sociétés commerciales, le commissaire aux comptes prend connaissance des statuts et du K bis de l’entité.
Il s’entretient avec le représentant de l’entité des éléments d’identification relevés.
08. – Lorsqu’il ne peut rencontrer le représentant de l’entité, le commissaire aux comptes met en oeuvre des mesures de vigilance complémentaires, parmi celles prévues à l’article R. 561-20 du code monétaire et financier.
Ces mesures peuvent notamment consister à obtenir une copie certifiée conforme des statuts ou à demander un extrait du K bis directement au greffe du tribunal de commerce.
09. – En application de l’article L. 561-8 du code précité, lorsque le commissaire aux comptes n’est pas en mesure d’identifier l’entité, il n’accepte pas le mandat.
2.2. Identification du bénéficiaire effectif
10. – En application de l’article R. 561-7 du code précité, le commissaire aux comptes détermine si les éléments obtenus sur l’entité lui permettent d’identifier le bénéficiaire effectif au sens des articles R. 561-1, R. 561-2 et R. 561-3 du même code. Si tel n’est pas le cas, il demande au représentant légal de l’entité l’identité du bénéficiaire effectif et les éléments justifiant cette déclaration. Le commissaire aux comptes peut estimer nécessaire d’obtenir à ce titre une déclaration écrite du représentant légal de l’entité.
11. – Lorsqu’il n’obtient pas de réponse du représentant légal ou lorsqu’il n’obtient pas le document demandé, le commissaire aux comptes peut décider de ne pas accepter le mandat. S’il l’accepte, il prévoit de renforcer sa vigilance sur le risque de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme tout au long de son mandat.
12. – Outre les situations mentionnées au paragraphe 6 de la présente norme, dans lesquelles le commissaire aux comptes n’est pas soumis aux obligations de vigilance mentionnées au paragraphe 5, l’obligation d’identifier le bénéficiaire effectif est réputée satisfaite lorsque le risque de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme est faible et que l’entité est :
- une filiale d’une entité mentionnée aux 1 à 6 de l’article L. 561-2 du code précité, à la condition que la société mère atteste à la fois qu’elle vérifie que sa filiale procède à l’identification du bénéficiaire effectif et qu’elle a accès aux éléments d’identification réunis par sa filiale ;
- un organisme de placements collectifs, une société de gestion ou une société de gestion de portefeuille le représentant, agréé par l’Autorité des marchés financiers, dès lors que le commissaire aux comptes s’est assuré de l’existence de cet agrément.
2.3. Eléments d’information pertinents sur l’entité
13. – Les obligations relatives au recueil des éléments pertinents sur l’entité sont réputées satisfaites par la collecte des informations prévues à l’article 13 du code de déontologie de la profession de commissaire aux comptes.
2.4. Autres obligations du commissaire aux comptes relatives à la vigilance à l’égard de l’entité et du bénéficiaire effectif
14. – Le commissaire aux comptes conserve dans son dossier les documents relatifs à l’identité de l’entité et, le cas échéant, du bénéficiaire effectif ainsi que les éléments d’information pertinents sur l’entité ou, le cas échéant, les documents établissant que l’entité remplit les conditions requises pour bénéficier des dérogations mentionnées aux paragraphes 06 et 12 de la présente norme.
Cette documentation doit permettre au commissaire aux comptes d’être en mesure de justifier, à tout moment, aux autorités de contrôle l’adéquation des mesures de vigilance qu’il a mises en oeuvre aux risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme.
15. – Pendant toute la durée du mandat, le commissaire aux comptes exerce une vigilance constante, adaptée aux risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme, sur les éléments obtenus à l’occasion de l’acceptation du mandat en vue de conserver une connaissance adéquate de l’entité.
3. Obligations de vigilance à l’égard des opérations réalisées par l’entité
16. – Lorsqu’il apprécie le caractère probant des éléments collectés à l’occasion des travaux mis en oeuvre pour les besoins des missions et prestations mentionnées au paragraphe 2, le commissaire aux comptes procède à un examen attentif des opérations objet de ses contrôles, en veillant à ce qu’elles soient cohérentes avec sa connaissance de l’entité.
17. – Lorsqu’il s’agit d’opérations particulièrement complexes ou d’un montant inhabituellement élevé ou ne paraissant pas avoir de justification économique ou d’objet licite, le commissaire aux comptes effectue un examen renforcé qui consiste à se renseigner auprès de l’entité sur l’origine et la destination des fonds ainsi que sur l’objet de l’opération et l’identité de la personne qui en bénéficie.
4. Obligations de déclaration à TRACFIN
18. – A l’issue de l’examen des opérations réalisé dans le cadre des dispositions des paragraphes 16 et 17 ci-dessus, en application du I de l’article L. 561-15 du code monétaire et financier, le commissaire aux comptes déclare à TRACFIN :
- les opérations portant sur des sommes dont il sait, soupçonne ou a de bonnes raisons de soupçonner qu’elles proviennent d’une infraction, hors fraude fiscale, passible d’une peine privative de liberté supérieure à un an ou participent au financement du terrorisme ;
- les sommes ou opérations dont il sait, soupçonne ou a de bonnes raisons de soupçonner qu’elles proviennent d’une fraude fiscale, uniquement lorsqu’il est en présence d’au moins un critère défini par le décret no 2009-874 du 16 juillet 2009.
19. – La déclaration à TRACFIN est effectuée par le ou les signataires du rapport sur les comptes. Elle est établie par écrit ou peut être orale. Dans ce dernier cas, elle est recueillie par TRACFIN en présence du déclarant et est accompagnée de la remise de toute pièce ou document justificatif venant à son appui.
20. – Lorsque le commissaire aux comptes est une personne morale et que les rapports sont signés à la fois par le représentant de la société de commissaire aux comptes et par celui ou ceux des commissaires aux comptes associés, actionnaires ou dirigeants qui ont participé à l’établissement des rapports, la déclaration est signée par l’ensemble de ces signataires.
En cas de désaccord, la déclaration peut être effectuée par un seul d’entre eux. Il en va de même lorsque la mission est réalisée par plusieurs commissaires aux comptes.
21. – La déclaration à TRACFIN comporte les indications prévues au I de l’article R. 561-31 du code précité :
- l’identification et les coordonnées du déclarant ;
- les éléments d’identification et de connaissance de l’entité et, le cas échéant, du bénéficiaire effectif ;
- la mission légale confiée ;
- le descriptif des opérations concernées ;
- les éléments d’analyse qui ont conduit le commissaire aux comptes à accepter la mission ;
- les pièces ou documents justificatifs utiles à son exploitation par TRACFIN.
22. – En application de l’article R. 561-25 du code précité, le déclarant reçoit, sauf indication contraire de sa part, l’accusé de réception de la déclaration effectuée et répond à toute demande de TRACFIN.
23. – Lorsqu’il a effectué une déclaration, le commissaire aux comptes porte par la suite à la connaissance de TRACFIN toute information de nature à infirmer, conforter ou modifier les éléments contenus dans cette déclaration.
24. – Lorsque le commissaire aux comptes est une personne morale, son dirigeant peut, en application du III de l’article R. 561-23 du code précité, prendre l’initiative de déclarer lui-même, dans des cas exceptionnels, une opération lui paraissant devoir l’être. Cette déclaration est confirmée, dans les meilleurs délais, par le déclarant.
25. – La déclaration à TRACFIN est confidentielle. Il est interdit, sous peine des sanctions prévues à l’article L. 574-1 du code précité, de porter à la connaissance de l’entité ou de tiers l’existence et le contenu de la déclaration, à l’exception du Haut Conseil du commissariat aux comptes. Le commissaire aux comptes ne fait pas figurer la déclaration dans son dossier.
26. – Les informations mentionnées à l’article L. 561-20 du code précité sont communiquées lorsque les conditions suivantes sont réunies :
- les informations divulguées sont nécessaires à l’exercice, au sein du réseau ou de la structure d’exercice professionnel, de la vigilance en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme et seront exclusivement utilisées à cette fin ;
- les informations ne sont échangées qu’entre personnes soumises à l’obligation de déclaration prévue à l’article L. 561-15 du même code dans le pays où elles exercent ;
- le traitement des informations réalisé dans ce pays garantit un niveau de protection suffisant de la vie privée et des droits fondamentaux des personnes.
5. Liens éventuels entre la déclaration à TRACFIN et la révélation des faits délictueux au procureur de la République
27. – Lorsque le commissaire aux comptes a connaissance d’opérations dont il sait qu’elles portent sur des sommes qui proviennent d’une infraction passible d’une peine privative de liberté supérieure à un an ou qui participent au financement du terrorisme, il procède à une déclaration à TRACFIN et révèle concomitamment les faits délictueux au procureur de la République, en application du deuxième alinéa de l’article L. 823-12 du code de commerce.
28. – Lorsque le commissaire aux comptes n’a que des soupçons ou de bonnes raisons de soupçonner que des opérations portent sur des sommes qui proviennent d’une infraction passible d’une peine privative de liberté supérieure à un an ou qui participent au financement du terrorisme, il procède uniquement à la déclaration à TRACFIN. En effet, à ce stade, le commissaire aux comptes ne sait pas si ses soupçons sont fondés car il ne dispose pas d’élément tangible.
Les soupçons ne constituent pas des faits délictueux au sens de l’article L. 823-12, deuxième alinéa, du code de commerce ou des irrégularités au sens des articles L. 823-12, premier alinéa, et L. 823-16 (3°) du même code.
29. – Lorsqu’il a déclaré des soupçons, le commissaire aux comptes réapprécie tout au long de sa mission les éléments déclarés dès lors qu’il a connaissance d’informations venant renforcer ou infirmer ses soupçons et en tire les conséquences éventuelles au regard de ses obligations de révélation. Cela peut notamment être le cas lorsqu’il est éventuellement informé par la suite de la transmission par TRACFIN d’éléments au procureur de la République alors qu’il n’a pas été lui-même amené à faire une telle démarche. »
6. ANNEXE 8-9 citée au paragraphe 04 de la NEP 9605
DÉCISION DU HAUT CONSEIL DU COMMISSARIAT AUX COMPTES RELATIVE AUX PROCÉDURES ET MESURES DE CONTRÔLE INTERNE EN MATIÈRE DE LUTTE CONTRE LE BLANCHIMENT DES CAPITAUX ET LE FINANCEMENT DU TERRORISME
Séance du 14 janvier 2010
Le Haut Conseil du commissariat aux comptes a défini comme suit les procédures et mesures de contrôle interne que les commissaires aux comptes mettent en place en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, en application des dispositions de l’article R. 561-38 du code monétaire et financier.
1. Les commissaires aux comptes mettent en place, au sein de la structure d’exercice professionnel dans laquelle ils exercent, qu’elle soit en nom propre ou sous forme de société, des systèmes d’évaluation et de gestion des risques de blanchiment des capitaux et de financement du terrorisme, en application de l’article L. 561-32 du code monétaire et financier.
2. Chaque structure d’exercice professionnel désigne le ou les membres de la direction responsables de la mise en place et du suivi de ces systèmes d’évaluation et de gestion des risques ainsi que des procédures correspondantes.
3. Chaque structure d’exercice professionnel désigne un correspondant en charge de diffuser les informations utiles en la matière émanant de TRACFIN et du Haut Conseil du commissariat aux comptes, et met à sa disposition les moyens appropriés pour ce faire.
4. Le commissaire aux comptes assume lui-même le rôle de correspondant et de responsable de la mise en place et du suivi des systèmes et des procédures lorsqu’il exerce en nom propre.
5. Chaque structure d’exercice professionnel élabore et tient à jour une classification des risques de blanchiment des capitaux et de financement du terrorisme attachés aux mandats, en fonction des caractéristiques des entités, et notamment en fonction des activités exercées par ces entités, de la localisation de ces activités, de la forme juridique et de la taille de ces entités.
6. Les procédures relatives à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme mises en place au sein de la structure d’exercice professionnel par les commissaires aux comptes, portent sur :
a) L’évaluation des risques de blanchiment et de financement du terrorisme au sein de l’entité qui les sollicite ou pour laquelle ils interviennent, au regard de la classification élaborée ;
b) La mise en oeuvre des mesures de vigilance lors de l’acceptation et lors de l’exercice du mandat, dans le respect des normes d’exercice professionnel ;
c) La conservation, pendant la durée légale, des pièces relatives à l’identification de l’entité et du bénéficiaire effectif ;
d) Les modalités d’échanges d’informations au sein des structures d’exercice professionnel et des réseaux, dans les conditions définies aux articles L. 561-20 et L. 561-21 du code monétaire et financier ;
e) Le respect de l’obligation de déclaration individuelle à TRACFIN ;
f) La mise en oeuvre de procédures de contrôle périodique et permanent des risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme.
7. Les commissaires aux comptes prennent en compte, dans le recrutement de leurs collaborateurs, les risques au regard de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.
8. Ils assurent l’information et la formation de leurs collaborateurs sur les obligations liées à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, et sur les procédures mises en place au sein de la structure d’exercice professionnel. Ils déterminent la fréquence de la mise à jour des connaissances des collaborateurs selon l’évolution de la réglementation et des procédures applicables. »