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  • NORMES GENERALES APPLICABLES A L’ENSEMBLE DES MISSIONS

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  • NORMES DE COMPORTEMENT PROFESSIONNEL

116 : Déclaration de certaines opérations au TRACFIN dans le cadre
de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme

  • LA NORME

Le Code monétaire et financier impose à l’expert-comptable de déclarer au service
institué en vertu de l’article L.562-4 du même Code, c’est-à-dire au TRACFIN 1, les
opérations qui portent sur des sommes :
Рlorsque celles-ci pourraient provenir du trafic de stup̩fiants, de la fraude aux
intérêts financiers des Communautés européennes, de la corruption ou
d’activités criminelles organisées ou
– qui pourraient participer au financement du terrorisme.

  • MODALITES D’APPLICATION DE LA NORME OBJECTIF DES AUTORITES PUBLIQUES

Le dispositif de lutte contre le blanchiment de capitaux d’origine illicite et le financement du terrorisme, tel que prévu par le Titre VI « Obligations relatives à la lutte contre le blanchiment de capitaux » du Livre V du Code monétaire et financier, est fondé notamment sur la déclaration d’opérations suspectes par les organismes financiers et les personnes mentionnés à l’article L.562-1 de ce Code. La déclaration a pour objectif de permettre à TRACFIN de recueillir et rassembler tous renseignements propres à établir l’origine des sommes ou la nature des opérations. Lorsque les informations recueillies mettent en évidence des faits susceptibles de relever du délit de blanchiment ou de financement du terrorisme, TRACFIN en réfère au procureur de la République.

  • CHAMP D’APPLICATION POUR LES EXPERTS-COMPTABLES
  • Missions

Toutes les missions acceptées entrent dans le champ d’application de l’obligation de
déclaration, mais uniquement dans la mesure où elles conduisent l’expert-comptable à
prendre connaissance des opérations passées ayant eu des conséquences financières.

  • Opérations

Toutes les opérations passées ayant eu des conséquences financières, et donc « qui
portent sur des sommes », venues à la connaissance de l’expert-comptable dans
l’accomplissement des missions acceptées entrent dans le champ de sa déclaration ; il
s’agit donc non seulement de ce qui lui a été confié, mais aussi de ce qu’il a vu, entendu et
compris.

  • OPERATIONS ENTRANT DANS LE CHAMP DE LA DECLARATION
  • Opérations de blanchiment

L’article 324-1 du Code Pénal définit le blanchiment comme « le fait de faciliter, par tout moyen, la justification mensongère de l’origine des biens ou des revenus de l’auteur d’un crime ou d’un délit ayant apporté à celui-ci un profit direct ou indirect. Constitue également un blanchiment le fait d’apporter un concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d’un crime ou d’un délit. »

  • Opérations de financement du Terrorisme

Le financement de terrorisme entre dans le délit d’acte de terrorisme et est décrit par
l’article 421-2-2 du Code Pénal, comme le fait de financer une entreprise terroriste en
fournissant, en réunissant, ou en gérant des fonds, des valeurs ou des biens utilisés ou en
sachant qu’ils sont destinés à être utilisés, en tout ou partie, en vue de commettre [un acte
de terrorisme], indépendamment de la survenance d’un tel acte ».
A la différence d’opérations de blanchiment, qui consistent à faire entrer des fonds générés
par des activités illégales dans les circuits financiers d’entreprises légitimes pour dissimuler leur origine criminelle, les schémas de financement du terrorisme ont pour objectif de dissimuler la destination et l’usage final de fonds d’origine légales ou non.

  • FONDEMENT DE LA DECLARATION

Si l’expert-comptable a un soupçon sur le caractère illicite, au regard du Titre VI du
Livre V du Code monétaire et financier, de l’origine ou de la destination des sommes sur lesquelles porte l’opération dont il a eu connaissance dans l’exercice de sa profession, il procède à la déclaration de cette opération à TRACFIN.
L’expert-comptable procède à cette déclaration bien qu’il ne puisse qualifier l’éventuelle
infraction à l’origine des sommes en cause ou s’assurer qu’elle relève des infractions
prévues à l’article L.562-2 du Code monétaire et financier. En effet, la déclaration concerne les situations où l’expert-comptable n’est certain, ni de la finalité de l’opération envisagée, ni de l’existence d’une infraction, ni encore de sa qualification pénale éventuelle. Dans cette situation d’incertitude, l’expert-comptable a un soupçon est fondé car il n’a pas pu lever, par les diligence qu’il a mis en oeuvre, le doute né dans son esprit . Il lui appartient de décider s’il doit ou non procéder à une déclaration et il ne saurait déléguer cette responsabilité. En cas de doute, il peut utilement consulter TRACFIN.
Lorsque, postérieurement à sa déclaration, l’expert-comptable a connaissance
d’éléments nouveaux de nature à renforcer ou à lever ses soupçons sur l’opération
déclarée, il en informe TRACFIN, conformément aux dispositions de l’article L.562-3
du Code monétaire et financier.
Les obligations de l’expert-comptable sont indépendantes de celles de l’entreprise. Ainsi, le fait que l’entreprise, lorsqu’elle – même est soumise aux dispositions de la lutte contre le blanchiment, ait déjà procédé à une déclaration sur une opération, ne dispense pas l’expertcomptable de satisfaire à sa propre obligation si, ayant eu connaissance dans l’exercice de sa profession de ladite opération, il a des soupçons sur le caractère illicite de l’origine ou de la destination des sommes.

  • MODALITE DE LA DECLARATION

La déclaration peut être verbale ou écrite. Il est cependant souhaitable de procéder à une
déclaration écrite2. TRACFIN accuse réception de la déclaration.

La déclaration écrite comporte les éléments suivants :
– identification de l’expert-comptable
– identification de l’entité,
– identification d’autres personnes intervenant dans l’opération (donneur d’ordre,
bénéficiaire, garant, intermédiaires, …),
– description de l’opération déclarée,
– circonstances à l’origine des soupçons sur le caractère illicite de l’origine ou de la
destination des sommes sur lesquelles porte l’opération,
– tout autre information que l’expert-comptable estimerait pouvoir être utile à

  • TRACFIN.

Aux termes de l’article L.574-1 du Code monétaire et financier, le fait de porter à la
connaissance du propriétaire des sommes ou de l’auteur des opérations, l’existence d’une
déclaration est sanctionné pénalement. Ainsi, la déclaration à TRACFIN est confidentielle.
L’expert-comptable n’a pas à signaler l’existence d’une déclaration, même auprès des
personnes constituant le gouvernement d’entreprise.
Cette disposition empêche également l’expert-comptable de signaler à ces personnes les
opérations suspectes en matière de blanchiment ou de financement du terrorisme qu’il aurait relevées.

  • DROIT DE COMMUNICATION DE TRACFIN

En vertu de l’article L.563-4, TRACFIN dispose, auprès de l’ensemble des personnes
mentionnées à l’article L.562-1 du Code monétaire et financier, d’un droit de communication
des pièces relatives à une opération ayant fait l’objet d’une déclaration.
INOPPOSABILITE DU SECRET PROFESSIONNEL
En vertu de l’article L 562-8, l’expert-comptable ayant effectué une déclaration de bonne foi, ne peut être poursuivi ni sur la base des articles 226-13 et 226-14 du code pénal ni en  responsabilité civile. En cas de préjudice résultant directement d’une telle déclaration, l’Etat répond du dommage subi.

  • MODALITES PRATIQUES
  • Le respect de l’obligation légale de vigilance

Outre les obligations imposées pour les directives européennes, l’obligation de vigilance est
aussi imposée par les nouvelles normes internationales d’audit que l’Union Européenne a
décidé de transposer. Sur le plan pratique, le respect de cette obligation nécessite la
démarche suivante :
La vérification de l’identité des clients, des autres parties contractantes, et le cas échéant,
des bénéficiaires réels des opérations, par la mise en place d’un dispositif de contrôle avec
prise en copie, et conservation durant cinq ans, des documents probants établissant l’identité des intervenants et des cocontractants concernés, notamment s’il apparaît que certaines personnes sont susceptibles d’intervenir ou d’agir pour le compte d’autrui.
La surveillance accrue des opérations impliquant directement ou indirectement des
« personnes politiquement exposées »
Il s’agit notamment de personnes exerçant ou ayant exercé d’importantes fonctions
publiques comme par exemple : chef d’état ou de gouvernement, autres membres du
gouvernement, fonctionnaires, magistrats, militaires de haut rang ou responsables des
entreprises ou des partis politiques susceptibles de peser sur des décisions économiques et
financières.
Il est considéré que les relations d’affaires avec les membres de la famille, ou avec
les collaborateurs des personnes politiquement exposées, présentent des risques
similaires.
L’examen attentif des situations atypiques telles que :
􀂃 L’existence chez le client de dirigeants de droit absents ou inactifs (conjoint,
parents, relations….) ;
􀂃 L’animation des activités par des dirigeants de fait, agissant avec ou sans mandat ;

􀂃 La détention significative du capital par des associés majoritaires inconnus et/ou
physiquement non présents ;
􀂃 L’interposition de structures sociétales plus ou moins opaques, domiciliées ou non à
l’étranger, dotées de représentants successifs inconnus ;
􀂃 L’obtention de financements par des tiers non identifiés avec précision (associés ou
non)
en vue d’évaluer les risques des opérations illégales.

  • L’attention portée à l’origine et à la destination des fonds

L’objectif est de déceler les mouvements financiers présentant des caractéristiques
inhabituelles, telles que :
􀂃 Une complexité non-justifiée ;
􀂃 L’absence de justification économique ;
􀂃 Le caractère illicite, atypique ou hors objet social de l’opération ;
􀂃 La provenance douteuse des fonds (paradis bancaires, pays non coopératifs) ;
􀂃 Une négociation à impact financier anormal (rentabilité exceptionnelle, déficit
excessif) ;
􀂃 Les transactions transfrontalières inhabituelles.
Le respect de l’obligation de tenter de lever les doutes
L’expert-comptable confronté à un doute doit faire preuve de l’esprit critique et de
discernement et dans ses travaux destinés à lever le doute.
La transformation d’un doute en soupçon
L’expert-comptable confronté à un doute doit engager une démarche de clarification au
moyen des investigations complémentaires. Si le doute n’est pas levé, l’expert-comptable
sera conduit, sur la base des constatations factuelles opérées, à identifier les éléments
objectifs de nature à faire naître un soupçon de blanchiment.
S’il y a des tels éléments objectifs, il fera la déclaration sur TRACFIN.
S’il n’y a pas d’éléments objectifs, la déclaration est sans objet.

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