Action civile

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 V.  Action civile

 

Conditions de recevabilité

8140

CPP art. 2 s

P-I-39700 s

En principe, seules les personnes physiques et morales ayant personnellement subi un préjudice directement causé par l’infraction peuvent exercer l’action civile en réparation de leur dommage.

 

Précisions

a.  L’entrave au fonctionnement régulier du comité d’entreprise cause nécessairement à ce dernier un préjudice dont il est fondé à demander réparation (Cass. crim. 29-3-1973 n° 90-784.72 ; 4-1-1979 n° 77-93.761). Ce délit n’entraîne pas, en revanche, un préjudice direct et personnel pour les délégués syndicaux agissant à titre personnel (Cass. crim. 28-11-1984 n° 83-93.094), pour les salariés eux-mêmes (Cass. crim. 18-12-1990 n° 89-80.333 : RJS 2/91 n° 199), ou pour le président du comité d’entreprise, non mandaté par ce dernier (Cass. crim. 21-5-1998 n° 3202 : RJS 10/98 n° 1242).

Les membres du comité d’entreprise ne peuvent exercer l’action civile, à titre personnel, que si ce délit consiste en une atteinte aux droits et prérogatives attachés à la qualité personnelle de membre du comité. Tel n’est pas le cas de l’entrave à la gestion des oeuvres sociales. Celle-ci ne porte atteinte qu’aux droits et attributions du comité lui-même (Cass. crim. 28-10-1980 n° 80-90.717).

Sur la recevabilité de l’action des syndicats professionnels, voir n° 8141.

b.  Les infractions à la sécurité du travail n’engendrent pas de préjudice personnel et direct pour le comité d’entreprise (Cass. crim. 28-5-1991 n° 90-83.957 : RJS 7/91 n° 852). De même, le CHSCT ne peut se prévaloir d’un préjudice direct et personnel en cas de délits d’homicides et de blessures involontaires subis par des tiers à cet organisme (Cass. crim. 11-10-2005 n° 5444 : RJS 1/06 n° 56).

La victime d’un accident du travail (ou ses ayants droit en cas de décès) peut en revanche se constituer partie civile devant la juridiction répressive, mais aux seules fins de faire établir la faute de l’employeur. Elle ne peut en principe obtenir réparation de son préjudice devant cette juridiction (Cass. crim. 15-10-1970 n° 93-383.68 ; 10-3-1993 n° 92-81.893 : RJS 11/93 n° 1139). Il s’agit là d’une conséquence du principe de la réparation forfaitaire dont bénéficient les victimes d’accidents du travail (voir n° 175).

Sur la possibilité pour la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle d’agir en reconnaissance de la faute inexcusable malgré l’absence de responsabilité pénale de l’employeur, voir n° 178, c.

c.  En principe, les salariés d’une société ne subissent pas un préjudice direct et ne peuvent donc se constituer partie civile en cas d’abus de biens sociaux commis par un dirigeant de l’entreprise (Cass. crim. 7-3-2000 n° 1722 ; 28-1-2004 n° 731 : RJS 11/04 n° 1176). S’agissant de l’action des syndicats, voir n° 8141, a.

d.  Les organismes de sécurité sociale peuvent exercer l’action civile devant les juridictions pénales en cas d’infraction aux prescriptions de la législation de sécurité sociale (CSS art. L 244-1). L’Urssaf peut ainsi agir en recouvrement des cotisations et majorations de retard qui lui sont dues, à l’occasion des poursuites engagées contre l’employeur pour infraction au paiement des cotisations.

En revanche, en cas d’accident du travail non déclaré par l’employeur ou déclaré hors des délais requis, l’action en remboursement des prestations servies à la victime de cet accident ne peut être exercée par les caisses devant la juridiction répressive (Cass. soc. 20-3-1969 n° 68-11.879 ; 4-6-1970 n° 69-12.322).

 

8141

C. trav. art. L 411-11

L-V-2550 s

Les syndicats professionnels peuvent exercer tous les droits réservés à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif de la profession qu’ils représentent.

Dans certains cas particuliers, les organisations syndicales représentatives peuvent par ailleurs être autorisées à exercer en justice les actions individuelles des salariés, y compris devant les juridictions pénales.

 

Précisions

a.  Dès lors qu’il représente bien la profession, un syndicat peut exercer l’action civile fondée sur la défense de l’intérêt collectif de la profession à laquelle appartient le personnel d’une entreprise, même s’il n’a pas été reconnu comme représentatif dans cette dernière (Cass. crim. 22-11-1977 n° 76-93.162). L’existence d’un préjudice résultant d’une infraction pénale commise par l’employeur, et justifiant l’action civile du syndicat, a été reconnue dans de nombreuses hypothèses : entrave au fonctionnement du comité d’entreprise (Cass. crim. 25-4-1989 n° 87-91.068 : RJS 7/89 n° 595), délit d’obstacle à la mission des inspecteurs ou contrôleurs du travail (Cass. crim. 19-3-1985 n° 84-90.353 ; 4-10-1988 n° 87-80.084 : RJS 1/89 n° 49), violation de la réglementation relative à la médecine du travail (Cass. crim. 9-5-1978 n° 77-90.851), au travail temporaire (Cass. crim. 22-6-1993 n° 92-82.928), au repos hebdomadaire (n° 3975), aux dispositions relatives au licenciement et à la consultation des représentants du personnel (Cass. crim. 3-12-1996 n° 5254 : RJS 5/97 n° 563), violation du secret médical à l’occasion du contrôle des arrêts de maladie des salariés (Cass. crim. 27-5-1999 n° 2259 : RJS 7/99 n° 938), notamment.

Est en revanche irrecevable la constitution de partie civile formée par un syndicat à raison du délit d’abus de biens sociaux commis par un dirigeant de l’entreprise (Cass. crim. 27-11-1991 n° 89-86.983 : RJS 3/92 n° 312 ; 11-5-1999 n° 1888 : RJS 10/99 n° 1265 ; 27-10-1999 n° 6609 : RJS 4/00 n° 422).

b.  Les organisations syndicales représentatives peuvent être autorisées, sous certaines conditions, à exercer en justice, au lieu et place des salariés, toutes actions ouvertes à ces derniers pour l’application de certaines réglementations (y compris par conséquent l’action civile ouverte au salarié ayant subi un préjudice personnel et direct du fait d’une infraction). Des dispositions de cette nature sont notamment prévues en matière de harcèlement moral ou sexuel (n° 2542, c), d’égalité professionnelle et d’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes (n° 4082, a), de licenciement pour motif économique (n° 5833), de contrat à durée déterminée et de travail temporaire (n° 2901), de marchandage et de prêt de main-d’oeuvre illicite (C. trav. art. L 125-3-1), d’emploi irrégulier de travailleurs étrangers (C. trav. art. L 341-6-2) et de groupement d’employeurs (C. trav. art. L 127-6).

 

Procédure

8142

CPP art. 3 s

Les personnes ayant subi un préjudice du fait d’une infraction pénale peuvent engager une action civile, soit devant la juridiction répressive (action civile jointe à l’action publique), soit devant la juridiction de droit commun (action civile séparée de l’action publique).

 

Précisions

a.  La partie qui a exercé son action devant la juridiction civile compétente ne peut ensuite la porter devant la juridiction répressive. Cette règle ne vaut que si les deux actions ont la même cause et le même objet, et opposent les mêmes parties (Cass. crim. 26-4-1983 n° 81-94.457 ; 22-10-1991 n° 89-86.402 : RJS 3/92 n° 304). Le salarié protégé ayant engagé contre son employeur une action en réintégration devant la juridiction prud’homale peut valablement se constituer partie civile devant le juge correctionnel dans le cadre des poursuites exercées contre ce même employeur pour entrave à l’exercice de ses fonctions représentatives (Cass. crim. 22-10-1991 n° 89-86.402 : RJS 3/92 n° 304).

b.  L’action civile engagée devant la juridiction répressive est soumise au délai de prescription de l’action publique : voir n° 8125. Lorsqu’elle est intentée indépendamment ou après extinction de l’action publique, l’action civile se prescrit selon les règles du Code civil.

c.  S’agissant des conséquences d’une loi d’amnistie sur les actions civiles, voir n° 8146.

 

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